« Toute la question est maintenant de savoir quelle augmentation du nombre de morts provoquera l’amincissement de la couche d’ozone. Pour cela, il faut d’abord évaluer l’augmentation de rayonnement sur la Terre, puis l’effet cancérigène du rayonnement supplémentaire. Sur le premier point, qui est de nature largement physique, la littérature scientifique avance d’habitude une croissance du rayonnement égale au double du rétrécissement : pour chaque pour-cent en moins de la couche d’ozone, le rayonnement augmente de 2 %. Donc, avec une diminution maximale de 6 % de la couche, on aurait un supplément maximal de rayonnement de 12 %. Conservons ce chiffre, le plus important qui soit avancé.
Quelle est maintenant l’augmentation corrélative des mélanomes ? Une particularité de la courbe d’évolution du mélanome selon l’âge permet d’envisager une réponse : avec le cancer du sein, la leucémie, le cancer du cerveau et la maladie de Hodgkin, c’est le cancer dont le risque s’ accroît le moins avec l’âge. A l’opposé, les risques de cancer de l’estomac, du côlon, du poumon, du foie et du tube digestif augmentent très vite avec l’âge. Ces cancers liés au style de vie (alcoolisme, tabagie, thé brûlant, etc.) résultent pour une bonne part d’un effet de « dose », c’est-à-dire du cumul des pratiques, tandis que les autres cancers tiennent plus à des hasards de l’environnement et à des susceptibilités génétiques. A la limite, un cancer purement environnemental, sans accumulation des effets de l’exposition, aurait une incidence constante avec l’âge. Pour donner un exemple de ces différences, au Danemark, les taux de mortalité par mélanome passent de 1 pour 10 000 à 30 ans, à 9 pour 10 000 à 70 ans, tandis que pour l’ensemble des tumeurs, les taux passent de 15 pour 10 000 à 30 ans à 970 pour 10 000 à 70 ans. Multiplication par 10 dans un cas, par 60 dans l’autre. Il paraît alors raisonnable de supposer que l’augmentation de l’incidence du mélanome sera égale à l’augmentation du rayonnement. 12 % d’augmentation des UV entraînerait 12 % d’augmentation du risque de mutation défavorable d’une cellule de la peau. »
Le Bras